« Les Porcs », de Marc-Édouard Nabe : la vengeance d’un homme seul – par Rounga

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Dans mon dernier article, j’avais raconté comment Marc-Édouard Nabe avait mis en scène sa propre situation financière et la défection de ses fans en exposant et en mettant en vente, à la place de ses tableaux habituels, des vêtements qu’il avait autrefois portés. Comme je l’avais expliqué, c’était un coup artistique extrêmement fort, mais également une façon de tirer la sonnette d’alarme. Il y avait en effet déjà le risque que, si ça continuait ainsi, le livre tant attendu dont il va être question ici ne trouve jamais le budget nécessaire à son édition, mais aussi que la clé de la galerie finisse bientôt sous la porte. La galerie de Nabe ! Endroit magique, local exigu ouvert à tous, tous les jours, où avaient lieu les plus improbables rencontres ! Ce quartier général des nabiens n’était pas seulement une galerie d’art et un point de vente de livres, c’était aussi le lieu de convergence mystérieux où finissaient infailliblement par aboutir tous ceux dont la vie possède, d’une manière ou d’une autre, une trajectoire métaphysique ; le pôle d’attraction où venaient se croiser les quelques êtres humains véritables qui vivent encore à Paris (ou ailleurs). Nabe se tenait tous les jours au milieu de ses tableaux, ouvert aux rencontres avec de parfaits inconnus, venus de tous horizons et de tous bords, avec qui il discutait des sujets les plus variés. On peut avoir un aperçu de ce genre de rencontres en allant sur la chaîne Youtube « Éclats de Nabe », qui répertorie justement ces petites étincelles qui jaillissent lorsque des visiteurs se frottent au maître des lieux comme sur un silex. On était dans l’anti-mondain par excellence. Loin de tout copinage, le principe de la galerie était justement de rester ouverte à l’éventualité de n’importe quelle rencontre. Si on a vu quelques célébrités agrémenter la galerie de leur présence furtive, c’était la plupart du temps accidentel. Et il y avait certes quelques habitués qui avaient l’air de former un cercle, mais on n’avait pas là une bande de copains cultivant un entre-soi fermé. Juste des profils extrêmement divers réunis par un intérêt commun autour d’une oeuvre. L’idée était de maintenir un lieu de vie collectif qui ne soit pas soudé par l’amitié.

Et puis un jour, tout s’est arrêté. Comme on pouvait le craindre, la vitrine du 4 rue Frédéric Sauton, dans laquelle les passants médusés pouvaient voir sur la couverture de Patience Adolf Hitler tenant une pancarte Je suis Charlie, s’est vidée, et le local a été déserté. Finie, la galerie…Même les « éclats » avaient depuis longtemps cessé de paraître. Seule restait la plate-forme en ligne marcedouardnabe.com permettant d’acheter les livres et les tableaux. À ce moment, j’ai vraiment cru que c’était fini, que le livre promis par Nabe resterait à jamais dans les tiroirs. Un livre attendu depuis près de quatre ans, dans lequel Nabe avait promis de régler leur compte aux conspirationnistes. Encore une défaite, me disais-je, de l’artiste seul contre la masse épaisse de l’indifférence généralisée, de la Vérité contre le mensonge…Et puis après, le dimanche 9 avril pour être précis (dimanche des Rameaux), les « éclats » sont repartis. Tous les jours étaient postées de nouvelles vidéos, vieilles d’un an, de ce qu’il s’était passé à la galerie. Ça annonçait forcément quelque chose. Quoi ? La sortie du livre, bien sûr ! C’est le lendemain du second tour de l’élection présidentielle que celui-ci a fait sa sortie officielle. Enfin on découvrait le titre maintenu secret depuis si longtemps : Les Porcs. « Les porcs », c’est une façon évangélique et dostoïevskienne de désigner les apôtres du complotisme dont le parcours est minutieusement décrit dans ce livre : Dieudonné, Soral, Meyssan, Blanrue, les membres de la Liste Antisioniste, et bien d’autres encore.

Les Porcs n’est pas un roman, mais plutôt une fresque présentant dans un ordre chronologique les évènements traversés et observés par Nabe. Ça commence à la première rencontre de Nabe avec Dieudonné en 1999, lors de l’émission Tapage, puis la suite de l’histoire est déroulée à la manière d’une grande tapisserie. Chaque chapitre est une sorte de tableau d’un évènement consacré au récit et à l’analyse d’un élément d’actualité ou d’un épisode vécu personnellement par l’auteur. En cela, Les Porcs est une synthèse, du point de vue de la forme, des différentes oeuvres que Nabe a publiées par le passé. D’abord, on retrouve ici la volonté de l’auteur de tout raconter sur sa vie, qui se manifestait déjà dans son journal intime. Ensuite, on trouve les commentaires des faits d’actualité les plus marquants, ce qui est dans la continuité des nombreux articles d’actualité écrits par Nabe au cours de sa carrière (Oui, Non, J’enfonce le clou, les tracts). Les passages dans les émissions télé tiennent également une place importante, comme dans un autre livre, Coups d’épée dans l’eau, qui retranscrivait un grand nombre d’interviews radiophoniques ou télévisuelles données par l’écrivain. La différence, ici, c’est que les interventions et les débats sont davantages racontés que retranscrits, ce qui permet de souligner les temps forts tout en analysant ce qui se passe. Et c’est l’un des gros point forts de ce livre, de raconter ainsi les passages médiatiques, en en proposant un commentaire et en dévoilant ce qui a lieu dans les coulisses. J’imagine que beaucoup de lecteurs ont, comme moi, gardé en mémoire la grande époque des tracts, des interventions de Nabe chez Taddéï, sur Zidane, sur l’Iran, sur le Paris-Dakar, etc. Ceux-là prendront un plaisir fou à revivre cette période à travers la lecture des Porcs, cette fois en découvrant l’envers du décor, les intérêts stratégiques de chaque émission, leur préparation, qui mettent en lumière la manière dont Nabe livre son combat, quels enjeux il défend. On prendra également une belle leçon sur les médias et la manière de les prendre à leur propre jeu, en lisant le récit des émissions d’Ardisson ou de Laurent Ruquier. On découvre dans ce livre à quel point Nabe est un stratège, à quel point il se sert des médias pour faire avancer son combat.

Son combat, c’est celui de la Vérité. Il est rare de percevoir dans la plume d’un écrivain cette tension constante vers la Vérité, cette façon d’aller tout droit vers elle, de rester fidèle à la fois à sa sensibilité et à la réalité, sans se laisser tenter par les déviations faciles que sont les idéologies. Chez Simone Weil aussi on retrouve ça. C’est pour cette raison que le complotisme est la cible de ce livre : prétendre que ce sont les Américains qui ont organisé le 11 septembre, c’est relayer un fatras de fausses informations, de pseudo-faits, de convergences douteuses, de soupçons mal fondés, c’est, en somme, assassiner la Vérité. Nabe donne tous les éléments dans ce livre, en plus de ceux qu’il avait donnés dans L’Homme qui arrêta d’écrire, pour remettre les points sur les i et éclairer les fameuses « zones d’ombre » sur lesquelles prospèrent les complotistes. Autre raison de combattre les théories de la conspiration : non seulement elles sont fausses, mais de plus elles anéantissent la valeur des grands combats arabes que Nabe estime portés par Al-qaïda hier, et par l’État Islamique aujourd’hui. Car Nabe n’a pas changé, et reste plus que jamais sur une ligne purement pro-Arabe, anti-Occident et anarchiste. Il est essentiel de bien enregistrer cela pour comprendre pourquoi Nabe a tenu ses distances avec Dieudonné, Soral, et la Liste Antisioniste. La lecture des Porcs, de ce point de vue, est un vrai rafraîchissement dans le contexte actuel, pour tous ceux qui étouffent entre la bien-pensance médiatique et la « dissidence » d’internet. Je ne peux pas décrire à quel point il est bon de lire des lignes aussi sincères, crues, jouissivement violentes, intensément enthousiastes, totalement intransigeantes, sans complaisance d’aucune sorte. Du Nabe, quoi. Les pseudo-rebelles d’extrême-droite feraient bien de lire les chapitres consacrés à Israël, au Liban, aux émeutes de Gare du Nord, à la crise des subprimes, à Madoff, au Front National, ça leur donnera une vraie leçon de radicalisme politique.

Mais ce qui est le plus fort, dans ce livre, c’est qu’il nous fait vivre, avec une précision inouïe (on a même des détails sur ce que mangent les protagonistes quand ils se rencontrent, car, comme dans les Évangiles, ça se passe souvent à table), l’itinéraire solitaire de l’écrivain et la solitude de son engagement. Il est extrêmement impressionnant de lire retrospectivement ce qu’ont été pour Nabe les années passées sans éditeur, à essayer d’exister grâce à l’audace, au talent, et à quelques bienfaiteurs de bonne volonté. Si Nabe consacre de longs passages à raconter ses interventions médiatiques, ce n’est pas pour le plaisir de parler de lui, mais pour en rendre compte comme d’autant de batailles menées au nom d’une guerre qu’il mène seul depuis trente ans. Car sa radicalité, il la doit précisément au fait de n’avoir jamais intégré aucun parti, aucun cénacle, aucune coterie, de n’avoir jamais cédé à l’esprit de camaraderie, de ne pas ménager un copain pour lui donner un coup de pouce en espérant un renvoi d’ascenseur. On reproche à Nabe de poignarder ses amis dans le dos, mais on ne se rend pas compte que c’est justement à ce prix qu’il peut prétendre au maximum de pureté littéraire et politique. Se donner cette liberté au risque de perdre des amis, c’est ce qui permet à Nabe de dire toujours toute la vérité sans aucune partialité, d’écrire exactement ce qu’il pense sans jamais rien retrancher. Et même si cela l’expose à un isolement extrême, cela ne l’empêche pas, depuis plus de dix ans, d’exprimer très haut et très fort ce qu’il a à dire. Soral, Dieudonné, Yann Moix, sont attaqués dans Les Porcs, mais il ne s’agit pas d’un réglement de compte mesquin et injuste pour défendre d’obscurs intérêts. Nabe n’est pas dans le dénigrement systématique. Il n’hésite pas à le dire quand il a trouvé certains sketches de Dieudonné bons, ou quand Soral a fait preuve d’une certaine tendresse. Les choses sont racontées telles qu’elles sont, sans déformation, car sa seule obligation est celle qu’il a, seul, face à la Vérité.

Ce qui est frappant dans cette incursion au sein des milieux divers traversés dans le livre (milieu éditorial, milieu médiatique, milieu alternatif), c’est de voir à quel point ceux-ci sont peuplés de gens hantés par des démons divers. Soif maladive de respectabilité, homosexualité refoulée, paresse, trouillardise, ambition, antisémitisme…Tous ceux qui essaient de trouver une place dans un milieu sont en fait possédés par ces tendances secrètes, que le contact avec Nabe a la particularité de révéler en pleine lumière. Systématiquement déçus de découvrir que Nabe n’est pas la projection de leurs propres fantasmes, arrêtés dans leur espoir de se servir de Nabe comme d’un moyen de satisfaire leur lubie, celle-ci ne fait que prendre plus d’ampleur en eux et les ronge ensuite totalement. Les trajectoires de Yann Moix, Soral, Blanrue, Laïbi s’expliquent ainsi. Étrangement, seul Dieudonné fait exception. C’est le seul qui n’ait jamais eu l’air fasciné par Nabe, mais interloqué seulement. Dieudonné apparaît ici comme un mollusque, sans vraie conviction, sans intelligence, sans flamme, mais toujours soumis à l’influence de son entourage.

Les Porcs était probablement le livre le plus attendu de la décennie, espéré par les lecteurs de Nabe, redouté par ses ennemis. À tel point qu’il a alimenté bon nombre de spéculations, malveillantes pour la plupart, sur le net. On (des forumeurs anonymes) a accusé Nabe de se détourner des sujets importants pour se consacrer, par simple désir de vengeance, à des personnalités insignifiantes médiatiquement, ou encore de vouloir réintégrer le Système en s’attaquant à ceux qui le combattent « vraiment ». Il est évident que ces critiques sont totalement inappropriées. Premièrement, Nabe reste toujours extrêmement près de l’actualité internationale dans tout le livre. Aucun sujet important n’est laissé de côté. Le choix d’orienter l’ensemble du livre contre le complotisme rend compte du fait que Nabe a été le seul à se méfier de ce phénomène dès son apparition, d’abord mélodie de fond qui peu à peu a pris de l’ampleur jusqu’à recouvrir aujourd’hui de son bruit assourdissant l’ensemble des commentaires alternatifs. Le complotisme est ce qui a permis d’éviter le tournant qu’aurait pu prendre le XXIème siècle après le 11 septembre et la guerre en Irak, et que Nabe prophétisait dès Une lueur d’espoir, en 2001. Il n’y a pas pire erreur que d’ignorer le caractère foncièrement anti-cosmique et anti-eschatologique du conspirationnisme, et de le traiter comme un phénomène marginal cantonné à internet. Aujourd’hui, le complotisme a gangrenné les esprits au point qu’ils deviennent incapables de voir la réalité telle qu’elle est. Dire qu’à l’heure où un Califat islamique est constitué et menace sérieusement l’Occident, on trouve encore des cons pour hausser les épaules et y voir une manipulation de la CIA ! Il ne faut pas s’étonner ensuite de passer systématiquement à côté de l’Histoire ! D’ailleurs, c’est sûrement une des raisons qui font que les complotistes sont également négationnistes, et remettent en cause l’Histoire. Le négationnisme existe pour se venger de n’être pas à la hauteur de l’Histoire, de se retrouver systématiquement dans le camp des losers. Rejouer l’Histoire, la réintérpréter complètement est tentant car il est plus facile de rabaisser le sens de la réalité plutôt que de s’élever à sa hauteur, et c’est précisément en quoi consiste toute l’entreprise conspirationniste. Les négationnistes savent qu’ils sont dans le camp des perdants, non pas parce que l’Histoire se répéterait et ferait toujours perdre le même camp, mais parce qu’il y a quelque chose d’éternel dans l’Histoire qui fait perdre ceux qui ne veulent pas le voir. C’est là toute la vérité métaphysique du complotisme. Qu’on ne dise donc pas que la lutte contre le conspirationnisme est un combat accessoire, c’est au contraire une nécessité absolue. Voilà pourquoi faire de Soral et Dieudonné des personnages centraux de son oeuvre n’est pas anodin, puisque ce sont les deux vecteurs les plus importants du complotisme. D’ailleurs, le livre n’est pas « consacré » à eux. D’autres personnalités tiennent une place importante, comme Carlos, Yann Moix, Jacques Vergès, Taddéï, Ardisson, et d’autres qui seraient restés des anonymes sans Les Porcs. Deuxièmement, à propos de la soi-disant volonté de Nabe de réintégrer le Système, disons clairement que cette accusation est ridicule. Nabe ne met pas d’eau dans son vin dans Les Porcs, dans l’espoir de se faire bien voir en attaquant la « dissidence ». C’est au contraire en surenchérissant dans la radicalité qu’il étrille ses cibles. La dynamite politiquement incorrecte est omniprésente dans le livre, ce qui le rendrait impubliable au sein de n’importe quel circuit classique d’édition. Non, Nabe ne se calme pas, et reste plus sulfureux que jamais.

Alors, finalement, qu’y a-t-il comme révélations compromettantes sur Dieudonné et Soral ? Est-ce que ce livre tient ses promesses en nous dévoilant « les vraies raisons pour lesquelles il faut les haïr » ? Disons d’abord que ce livre n’est que le premier tome des Porcs, titré : « La Paix (toute relative) ». C’est-à-dire que ce tome couvre seulement la période d’entente relativement amicale, bien que non dépourvue de tension, entre Nabe, Dieudonné et Soral. On est donc encore sûrement dans la partie « soft ». Mais on en apprend quand même de belles sur la lâcheté physique de l’apôtre au crâne rasé de la virilité traditionnelle, notamment à propos de sa fameuse agression par la LDJ, dont on apprend ici qu’elle était totalement prévue par l’intéressé, et que celui-ci a pris la fuite au premier signal. Beau coup de pub parfaitement maîtrisé et anticipé. On comprendra également mieux la raison de quelques uns de ses curieux revirements vis-à-vis du FN, en découvrant d’où ils ont été impulsés. Les origines louches de la Liste Antisionistes sont également révélées, ainsi que la faiblesse et la bêtise incurables de Dieudonné. J’imagine que le tome 2 sera encore plus féroce, d’autant plus qu’il concernera une période où Nabe s’est très peu exprimé, mais il est clair que ceux qui, par ignorance, gardaient un semblant d’estime pour ces deux individus n’auront plus d’excuse après avoir lu le premier tome des Porcs.

Il est clair que le style très fluide, très prenant du livre, donne envie de connaître la suite. Alors, à quand le tome 2 des Porcs ? Espérons qu’il paraisse bientôt. Il faut bien un Nagasaki après cet Hiroshima, pour démonétiser à jamais l’entreprise des escrocs du net. Mais, comme on sait, les conditions éditoriales de Nabe peuvent lui imposer des pauses assez longues entre ses parutions. Peut-être faudra-t-il encore quelques années avant de lire Les Porcs, tome 2. Quand on voit la qualité qui résulte de ces années de maturation d’une oeuvre, on se dit que, même si l’impact y perdrait un peu de sa force, au moins l’Éternité s’en souviendra.

Marc-Édouard Nabe : Les Porcs en auto-édition totale – Aldus

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Son nouveau livre était attendu depuis plus de deux ans, il est enfin arrivé à bon port. Marc-Edouard Nabe propose son 30ème livre, Les Porcs. Un imposant pavé noir de 1000 pages, excusez du peu. Après L’Homme qui arrêta d’écrire en 2010 (qui avait failli décrocher le Prix Renaudot, on s’en souvient), L’Enculé en 2011 et la republication de son premier livre Au régal des vermines en 2012, c’est le 4ème livre que Nabe publie directement lui-même en auto-édition. Des couvertures noires, juste le nom de l’auteur, le titre, rien au dos et en 4ème le numéro 30. Pas d’autre texte, de code barre, etc. Pas d’Amazon ou autres à la demande, de l’auto-édition totale, radicale. Un auteur qui s’entoure de quelques professionnels pour réaliser « son » livre (composition, maquette, corrections-relecture, assistant coordinateur) puis qui choisit lui-même un imprimeur. Une fabrication toujours aussi exceptionnelle, un livre cousu -vous pourrez en chercher longtemps sur les tables des libraires-, un beau papier légèrement ivoiré. Premier tirage à 1500 exemplaires. Côté distribution, Marc-Edouard Nabe propose son livre uniquement via son site internet. Un unique point de vente physique en colportage, Darius Krzemien comme un grand roi persan, sous son arbre Place Maubert à Paris. Avec ce livre, Marc-Edouard Nabe reprend la veine du Journal, couvrant dans ce premier volume les années 1999 à 2010.

Conversano se fait jeter de la galerie Nabe – par DrMarty et Eilec

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Conversano raconte s’être fait jeter de la galerie Nabe :

https://youtu.be/kc-NmyEHNNs?t=2083

Fidèle à sa ligne, il fait savoir qu’il est une larve incapable de rien. Internet donne la parole à tout le monde, mais tout le monde n’a pas forcément quelque chose à dire.

Le plus intéressant, c’est le roquet du milieu, qui dit : « mais le voeu de Marc-Édouard Nabe, c’est de retourner dans les médias. Si jamais il est interviewé par Conversano… » Nabe a bien compris qu’il ne retournerait pas dans les médias. La dernière fois qu’il est venu pour un livre à la télévision, c’était en 2011 pour l’Enculé et il n’a fait que Paris Première(Naulleau). Il a annoncé un livre à venir en janvier 2014 et est passé chez Taddéi (Europe 1) en décembre 2014 pour la galerie Hara-Kiri, mais pas un mot pour Patience.

Dans la scène suivante, il reprend quasiment mot pour mot la connerie de Soral sur Nabe et la Licra : lors du passage de Nabe, en janvier 2014, Jaku avait dit qu’il était insignifiant et qu’il ne valait pas la peine d’être attaquée. Soral a oublié le procès intenté en 1985 par… la Licra ! Et pour un passage TV, pas pour un livre !

Ça vaut bien la peine de s’en prendre à Soral si c’est pour reprendre par deux fois les conneries qu’il profère et essayer de piquer son créneau de « provocateur » « mal »-« pensant » d’Internet.

Premier papier sur « Les Porcs » – par Nicolas Olié

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Marc-Edouard Nabe vient de publier Les Porcs, son trentième livre, six ans après L’Enculé, qui transposait l’affaire DSK en un roman foutraque et capiteux, et surtout trois ans après avoir annoncé de manière fracassante dans l’émission Ce soir (ou jamais !) que l’ouvrage sortirait environ un mois plus tard. Il faudrait multiplier cette approximation par quarante et supporter encore un déluge d’âneries complotistes avant de pouvoir lire l’œuvre.

C’est un livre autoédité comportant, comme les deux précédents, une couverture noire où ne figure d’autre texte que le nom de l’auteur et le titre, cette fois en lettres orangées (ou dorées ?). Nabe, fier de s’autoéditer, appelle cela de l’anti-édition. Il faut dire, puisqu’ici l’auteur contrôle également cet aspect-là, que le travail est fait correctement : le papier est de qualité, la mise en page est d’une parfaite sobriété et je n’ai pas relevé dans ces mille pages plus de fautes que dans un livre de trois cents pages édité chez Gallimard.  On ne perd d’ailleurs pas de temps à relever les fautes, quand on lit Nabe. Ajoutons pour en finir sur cette question qu’on ne le trouve dans aucune librairie, mais qu’on peut le commander sur le site de Nabe ou l’acheter à Darius, un sans-abri du 5earrondissement de Paris.

Nabe promettait de faire du hachis de complotistes, de réduire les « personnes concernées » au suicide. Je les vois très bien en rire, au contraire, et continuer à se moquer de Nabe, mais nous n’en sommes qu’au premier tome. Qui sait si le deuxième ne contiendra pas tout le poison, comme on dit que la semence fertile est contenue in cauda ? Le livre ne tue pas encore, mais sa bénignité n’est pas imputable à la faiblesse de l’attaque. Les natures qui ne se remettent jamais en question peuvent survivre à toutes les humiliations, voilà tout. Les révélations que contient ce livre gêneront peut-être Soral, sans doute fera-t-il la grimace en voyant révélées certaines de ses lâchetés, certains de ses enculages non métaphoriques avec le père de son ami, mais ce n’est pas cela, je crois, qui lui causera un grand tort. Quelques passages de Nabe ressurgiront quelquefois au bas d’une vidéo de Soral, de Dieudonné ou de Salim Laïbi, mais ceux-ci survivront et continueront à propager leurs bêtises. D’ailleurs, je ne leur souhaite aucun mal. J’espérais un livre qui puisse leur faire honte de leur folie, mais ce livre est-il possible ? Il n’y a qu’un moyen de convaincre un fou, c’est la conversion, et on ne convertit évidemment pas un fou à la raison. C’est d’autant plus regrettable que l’on convertit assez facilement un homme sensé à la folie.

En vérité, Nabe consacre une place tout à fait minime au démontage des arguments complotistes, préférant démonter (ou démontrer) le ridicule et la bêtise du troupeau complotiste français dont Dieudonné et Soral sont les principales têtes bêlantes. Voilà ce qui est instructif, voilà ce qui est passionnant. C’est une sorte de journal intime (ou de mémoires) dont on n’aurait gardé que ce qui permet de comprendre l’évolution des quelques personnages cités plus haut.  C’est la genèse d’un merdier où l’on croise aussi Blanrue, Faurisson, Meyssan et Yann Moix, le seul à mon avis qui puisse vraiment être affecté par ce livre. Moi qui ai autant d’années que Nabe a écrit de livres, j’ai eu le sentiment de revivre les événements médiatiques de mon adolescence jusqu’à des temps récents : l’affaire Renaud Camus, les débuts de Ce soir (ou jamais !), l’après 11-Septembre, les tracts de Nabe, la publication des Bienveillantes de Littell, l’affaire Siné, etc. Se plonger dans ce gros pamphlet, c’est relire l’histoire de cette pseudo-dissidence française, de l’année 1999 à l’année 2010, à travers l’œil nombrilique de Nabe, et c’est s’y replonger comme si tout ce monde-là appartenait déjà à la vieille histoire, était déjà mort, puisque même pour parler des vivants, Nabe n’emploie jamais le présent.

Ce qui rend toute cette dégueulasserie si plaisante, c’est la drôlerie et l’intelligence des trouvailles à chaque ligne du livre, c’est la justesse et la truculence formidable du nabot. Depuis Le Régal, et comme il disait alors, nul n’est exclu de sa « gerbe d’or » : à part le terroriste Carlos, à part son avocat Thierry Lévy, ses maîtresses et quelques rares privilégiés, tout le monde est laid, gros, pédé, lâche, vieux, immonde, pour ne citer que les adjectifs les plus courants. C’est comme ça qu’il colore ses tableaux et leur donne du relief. Ici, la description vacharde a plus de vérité que bien des gentillesses hypocrites publiées ailleurs. Il faut lire les portraits de Yann Moix, « mi-nain, mi-mongolien, pas de bras longs, un peu androgyne sur les bords (parce que sans couilles) et boiteux (ce qui l’empêcherait toujours d’aller très loin dans la vie) », ou de Calixthe Beyala, qui apparaît d’abord comme une « petite vieille à la peau javellisée, la bouche tordue, les cheveux pendouillant comme de la salade flétrie, le corps défraichi planté de traviole dans deux pantoufles mitées », avant de se transformer dans le même paragraphe en une toute autre entité : « une lionne – bien que Scorpionne – scintillante et si soignée ! Cheveux de feu, peau merveilleusement unie, moirée, lisse, maquillage royal, bijoux partout, et quelle allure ! Elancée, animale, pleine de seins et de cul, ondulant énergiquement au son de sa voix en flûte fêlée. »

La causticité hilarante n’est pas d’un salaud qui se maquille l’âme. Ce sont les expressions qui correspondent le mieux au sentiment de Nabe sur le moment. Il n’est pas injuste, il ne réduit personne à sa laideur, il peint ce qu’il voit et ce qu’il sent au moment où il le voit et où il le sent. D’un paragraphe à l’autre, le gros con se change en gars fantastique suivant le degré de sympathie qu’il inspire à l’auteur. Quand tout le monde lui reproche d’incendier Taddeï, Nabe dit fort bien qu’il ne fait pas alors le bilan de leur amitié. D’ailleurs, aux vrais salauds qui divisent le monde en démocrates polis et en salauds injurieux, Nabe répond dès les premières pages, à travers une réplique prononcée sur un plateau de télévision : « C’est beaucoup plus subtil que ça, la vie, Miller ! » Et, en effet, par le raccourci et l’hyperbole, notre enragé de vérité fait passer plus de subtilités que les subtils Tartuffe. Malgré la muflerie, le narcissisme absolu, la crudité et la férocité du texte, ou peut-être grâce à tout cela, les flèches nabiennes frappent dans le mille. Bien des incohérences sont transpercées par ses traits mi rigolards mi consternés : celle de Dieudonné, le tolérant procédurier ; celle de Soral, le pétochard hâbleur ; celle des Arabes qui conspirent contre leur gloire, etc.

La haine du pinaillage est sans doute ce qui le pousse à abandonner la dénomination d’antisioniste, hypocritement employée par tout le cercle complotiste. Puisqu’aujourd’hui les antisionistes sont tous accusés d’être des antisémites, autant assumer l’épithète. Nabe ne se dérobe pas. Il assume l’insulte brandie par ses adversaires, ce qui permet de ne plus perdre de temps en dénégations : « Un antisémite, écrit-il, c’était désormais quelqu’un qui refuse de se plier au chantage de la Shoah martelé par certains juifs, dans le seul but qu’on ne parle pas d’Israël. » Après cela, lui reprochera-t-on encore d’être ambigu ?

Il ne l’est pas plus qu’une poignée de main à Claude Lanzmann. Lisez le livre, vous comprendrez.

Enfin « Les Porcs » de Marc-Édouard Nabe – présentation complète par l’internaute DrMarty

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Le trentième livre de Marc-Édouard Nabe est sorti, le 8 mai 2017, soit plus de trois ans après son annonce dans l’émission de Frédéric Taddéi, Ce soir ou jamais, le 10 janvier 2014.

Teaser : https://www.youtube.com/watch?v=_AamH2gp1XM

Titre : Les Porcs (1)
Le livre fait 1000 pages et constitue le premier tome d’une série à venir. L’écrivain annonçait 2000 pages en décembre 2014.

Sujet : Le complotisme.

Description :

Après cinq ans de travail, voici LES PORCS, le fameux livre de Marc-Édouard Nabe, écrit et autoédité dans la plus stricte liberté. Une fresque littéraire, politique et historique peinte au plafond de notre époque sur un fléau dont de plus en plus de gens prennent conscience : le complotisme.

Ayant connu de près les responsables en France de cette maladie mentale devenue business (l’extrême droite mais aussi ses adversaires si négligents et ignorants), Nabe raconte tout.

Comme personne ne l’avait fait, la machine Dieudonné-Soral est cruellement démontée. Mais bien d’autres personnages se trouvent étrillés dans ce premier tome qui foisonne de révélations et de choses vues permettant de comprendre un phénomène dont la nuisance n’a été rendue possible que par Internet. Car Les Porcs sont aussi le premier livre qui rend compte de la bascule de l’ancien monde moribond des médias à celui nouveau, mais déjà mortifère, d’Internet.

Longtemps, les désinformés ont cru Marc-Édouard Nabe complice des margoulins du révisionnisme. Aujourd’hui la lumière se fait sur son rôle d’observateur terrible. L’auteur d’Au régal des vermines, sans jamais abjurer ses convictions antisionistes et anarchistes, et tout en étant ostracisé par sa société pour avoir su expliquer le terrorisme, a toujours refusé de collaborer avec ces fakirs du faux que sont les « conspis ».

Tous ceux qui se prenaient pour des charcutiers de la Vérité sont ramenés à leur vraie nature de gros porcs se roulant dans leur merde et grouinant de bêtise. Il était temps qu’un homme en fasse définitivement du saucisson. Seul Nabe pouvait transformer la quenelle en boudin noir, très noir !

1000 pages

Où le trouver : L’écrivain auto-édite ses livres depuis 2010. Le livre est disponible sur son site, https://www.marcedouardnabe.com
Il tenait une galerie entre septembre 2015 et février 2017, rue Frédéric Sauton, dans le 5e arrondissement de Paris.

Vous avez raté le début ?

  • Nabe sur le complotisme (interviewé par Hicham Hamza, en mars 2012, pour le site Oumma.com) : https://www.youtube.com/watch?v=cGCB9kLuDUo
  • Texte de l’Avertissement, extrait du livre publié sur Internet en janvier 2014, et collé sur les murs de Paris.